07/06/2009
LTC VOUS PROPOSE TROIS INTERVIEWS EN DIRECT DE L’ETE DU LIVRE A METZ…
« JEAN-FRANCOIS THULL OU LA REDECOUVERTE DE JEAN DE PANGE… »
Bonjour Jean-François Thull, vous êtes né à Metz en 1977. Marié, membre de la SHAL (Société d’Histoire et d’Archéologie de la Lorraine), doctorant en Histoire contemporaine, vous avez consacré vos recherches et vos travaux à l'Histoire européenne et à l'identité régionale. Auteur de plusieurs articles dans des revues scientifiques et culturelles, vous travaillez au sein de la Fonction publique territoriale. La biographie « Jean de Pange, un Lorrain en quête d'Europe », publiée aux Editions Serpenoise, est votre premier ouvrage. Cette biographie propose de redécouvrir une figure atypique, l’œuvre d’un précurseur de l’Europe…
LTC : De son enfance viennoise à l’Europe d’après-guerre, la pensée de Jean de Pange a été influencée par la rencontre des grandes personnalités de son temps favorables à la construction européenne (Lyautey, Adenauer, Schuman, Coudenhove-Kalergi et Otto de Habsbourg-Lorraine). Fédéraliste dans l’âme, il puise son inspiration aux sources de l’identité et de l’héritage historiques et culturels d’une civilisation millénaire. L’actuelle UE ne correspond, aucunement, à l’idéal de Jean de Pange et de ses grands Inspirateurs, pourquoi, selon vous, un tel décalage ?
JFT : Cela tient principalement au fait que Jean de Pange était un historien qui avait une vision enracinée de l’Histoire. Il avait la conviction que l’Europe n’était certainement pas un concept d’intellectuel, mais une réalité vivante, qu’il avait vécue, lui-même, au travers de ses pérégrinations, entre la Porte de Brandebourg et les steppes de l’Asie Centrale. C’est toute la différence aujourd’hui avec l’Europe telle qu’elle se construit, qui est plutôt l’Europe des technocrates, ayant une vision purement intellectualisée, purement matérialiste des choses, et surtout une approche de l’Europe, qui est totalement désincarnée, totalement décontextualisée. C’est ce en sens que la pensée de Jean de Pange est une pensée féconde, puisque qu’elle se fonde sur l’Histoire, et donc, sur le vivant, sur l’identité des Peuples.
LTC : A la veille des élections européennes, et alors que l’UE se construit tous les jours, pourquoi un homme tel que Jean de Pange - qui a une œuvre aussi importante derrière lui (une vingtaine d’ouvrages et une centaine d’articles) - a-t-il été oublié de nos contemporains ?
JFT : Je crois qu’il a été victime de sa propre modestie et d’une humilité qui aujourd’hui a disparu chez nos contemporains. Il est vrai que c’est un précurseur. Il a lancé un certain nombre d’idées, il a posé des jalons, mais il a été une sorte de prophète sans disciples. C’est la raison pour laquelle effectivement l’importance de son œuvre, au sens des idées et de la réflexion, est inversement proportionnelle à l’oubli dans lequel il est tombé. De nos jours, on s’aperçoit que malgré tout l’idéal d’une Europe incarnée continue à faire son chemin, ainsi, Jean de Pange peut en être une des sources.
LTC : Cet esprit visionnaire est le premier à avoir formé le projet d’un manuel d’Histoire franco-allemand… Un demi-siècle plus tard, l’Histoire lui a donné raison. Selon vous, la construction de l’UE nécessitera-t-elle la création d’un manuel d’Histoire au niveau européen ? Etes-vous prêt à y participer ? Quels aspects particuliers de l’Histoire commune mettriez-vous en avant dans un tel ouvrage ?
JFT : Je crois effectivement que c’est une initiative qui à terme s’impose. Le manuel franco-allemand a été une assez belle réussite, en tous cas sur le principe et sur l’idée fondatrice de cet ouvrage. L’idée d’un manuel d’Histoire européenne me semble tout à fait bienvenue. A mon échelle, je suis naturellement prêt à y participer. Alors, quels aspects particuliers de l’Histoire commune à mettre en exergue ? Je crois qu’il faut d’abord rappeler que l’Europe préexiste aux Etats-Nations, car il faut se souvenir que nous sommes tous fils et filles d’une civilisation millénaire. Ce qui nous rassemble est infiniment plus proche que ce qui nous divise. D’ailleurs, Jean de Pange préférait célébrer la Bataille du Khalenberg (septembre 1683), où Charles V, Duc de Lorraine a vaincu les Ottomans, plutôt que célébrer Austerlitz ou la Bataille de Valmy. Je crois que l’Europe a besoin de symboles, de figures de proue. Une Histoire de l’Europe aurait pour vocation justement de mettre en valeur cet héritage commun, plutôt que de tenter d’utiliser la conscience européenne en insistant sur des guerres fratricides par exemple.
LTC : Avez-vous un autre projet d’ouvrage sur le feu ? Si oui, pouvez-vous nous en toucher quelques mots ?
JFT : Effectivement, j’envisage de me lancer dans une étude biographique sur un érudit Lorrain du XIXème siècle, Prosper Guerrier de Dumast, qui a eu un rôle assez fondamental, notamment dans la redécouverte de l’Histoire souveraine de la Lorraine qui avait été oubliée après la Révolution Française. En effet, tout ce qui relevait du passé de ce qu’on appelait les Provinces était banni des consciences. Et Prosper Guerrier de Dumast à sa mesure, à son échelle, a participé à ce réveil des Peuples, ce qui fait que je m’y consacre. Il a aussi été le fondateur du Musée Lorrain de Nancy, ce qui suffit à s’intéresser à son œuvre. Enfin, il a surtout été à l’origine du dynamisme intellectuel et universitaire de Nancy, puisqu’il a contribué à la création, ou plutôt, à la réinstallation des Facultés de Droit et de Lettres à Nancy. Mon projet consiste à présenter aux Lorrains et aux autres Européens cette figure que je trouve assez emblématique. Jean Mabire avait parlé « des Eveilleurs de Peuples ». Je crois que Prosper Guerrier de Dumast est une de ces figures, à l’échelle lorraine bien sûr. Il mérite, largement d’être redécouvert.
Cet interview est terminé, merci Jean-François Thull d’avoir bien voulu répondre à nos questions.
© Sylvain Rohe et Jean Dorval, le 05 mai 2009, pour LTC Lectures.
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© Photo ci-dessus : Jean Dorval 2009
« UN DICO POUR TOUT COMPRENDRE SUR L’ORIGINE DES RUES DE METZ. »
© Photo ci-dessus : Jean Dorval 2009
Bonjour Sébastien Wagner, vous êtes marié et avez deux enfants. Né à Metz, historien local, adepte des Archives Municipales de Metz, membre du Comité de la SHAL (Société d’Histoire et d’Archéologie de la Lorraine), diplômé de l’Université Paul-Verlaine de Metz, et de l’Ecole Pratique des Hautes Etudes de Paris-Sorbonne, vous publiez des articles dans des revues spécialisées et des ouvrages collectifs, et consacrez principalement vos travaux à votre ville natale, à l’Histoire contemporaine de la Moselle, ainsi qu’à la Guerre de 1870. Votre premier ouvrage, intitulé « Dictionnaire historique des rues de Metz », paru aux Editions Serpenoise, vient de sortir.
LTC : Quelle mouche vous a piqué de vouloir publier un tel ouvrage sur l’historique et les dénominations des rues de Metz ? N’est-ce pas un travail un peu trop fastidieux relevant plutôt de l’inventaire ?
SW : A première vue, un dictionnaire, surtout de ce type, puisqu’il existe 1.100 rues à Metz, soit 1.100 notices d’affilée, cela peut paraître un peu fastidieux… Aussi, je déconseille aux lecteurs de les lire à la suite ! Il faut savoir qu’il n’existait à ce sujet aucun ouvrage présentant toutes les rues messines, leur historique, leur dénomination, mais seulement quelques livres datés et limités au centre ville. L’originalité de ma démarche a été de partir de la ville actuelle, du ban de la ville originelle jusqu'aux six communes rattachées au XXème siècle, afin de raconter l’histoire de ces rues, leur tracé et leurs dénominations successives au cours des siècles.
LTC : Pouvez-vous, au choix, nous citer l’origine d’une des rues de Metz ?
SW : Beaucoup de rues sont intéressantes. Par exemple, la rue de l’Epaisse Muraille, une rue du Quartier Outre-Seille qui possède un tracé particulier. Elle fait une sorte d’angle droit, et longe l’ancienne muraille du XIIIème siècle, en reprenant intégralement sa forme. Ancien chemin de ronde, cette rue remonte, donc, à l’époque médiévale, et n’a pas reçu de modifications depuis. Je pourrais citer aussi la rue Sainte-Marie dont la forme courbe reprend l'emplacement d'un édifice romain (le "petit Amphithéâtre"). Cela démontre bien que les rues messines dans lesquelles on déambule tous les jours ont une histoire très ancienne, certaines remontant au Moyen-Age, et d’autres comme la Fournirue, la rue Serpenoise ou la rue Taison remontent jusqu'à l’époque romaine.
LTC : Quel est le sujet de votre prochain ouvrage ?
SW : J’ai plusieurs ouvrages sur le feu. J’ai donc malheureusement plus d’idées que de temps à leur consacrer. Je travaille actuellement sur un livre sur la Moselle, dont je n’ai pas encore arrêté la forme. Il faudra que je me mette d’accord avec mon éditeur, s’il me suit dans cette aventure… J’ai également un projet d’ouvrage collectif sur le passé prestigieux de la ville. Vous en saurez un peu plus dans quelques mois…
LTC : Question subsidiaire, Sébastien Wagner : trouvez-vous normal que la Ville de Metz utilise pour ses affichages le bâtiment historique de l’actuel Office de Tourisme ?
SW : La ville de Metz est chargée d’Histoire, Histoire que l’on rencontre à chaque coin de rue ou de place. La Place d’Armes en est un bon exemple. C’est une des plus belles places de la ville, mais aussi des plus symboliques. En effet, je le rappelle les quatre Pouvoirs y sont concentrés : le Pouvoir Judiciaire (avec la façade du Parlement, où se trouve à l’heure actuelle le Restaurant Le Montecristo) ; le Pouvoir Militaire (avec le Corps de Garde) ; le Pouvoir Religieux (avec la Cathédrale Saint-Etienne) ; et le Pouvoir Civil (avec l’Hôtel de Ville). Aussi, il est bien malheureux que d’une part le bâtiment qui abritait le Parlement n’ait toujours pas été ravalé, alors que l’Hôtel de Ville et le Corps de Garde l’ont été ; et d‘autre part, il est aussi regrettable que l’on utilise un bâtiment classé du XVIIIème comme tableau d’affichage pour la communication de la Municipalité. Cela rompt l’équilibre et l’harmonie de cet ensemble.
Merci, Sébastien Wagner, de nous avoir accordé un peu de votre temps.
© Sylvain Rohe et Jean Dorval, le 05 mai 2009, pour LTC Lectures.
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© Photo ci-dessus : Jean Dorval 2009
« LE CELIBAT CONTRE VENTS ET MAREES, SELON FLORENCE LHOTE. »
© Photo ci-dessus : Jean Dorval 2009
Bonjour Florence Lhote, vous êtes une jeune auteur née et vivant à Metz. Vous avez étudié les Lettres avant un passage dans l’Armée de Terre. Diplômée de l’Ecole Militaire de Saint-Maixent, vous avez travaillez dans le milieu journalistique et comme professeur de Français. Votre parcours atypique, vous permet de publier aux Editions Lucien Souny, en janvier 2009, un roman intitulé « Vierge à 30 ans ». Vous assurerez une séance de dédicaces le 20 juin 2009, à 14h00, à la Librairie Hisler-Even.
LTC : Votre héroïne, Florence Givere-Thoel, tout comme vous, se prénomme Florence, elle est aussi professeur de Français, elle a 30 ans (vous êtes donc de la même génération, puisque vous avez 22 ans)… Alors, avouez-nous tout, avez-vous puisé aux sources de votre expérience personnelle afin d’écrire ce roman ? Ou vous êtes-vous inspirée d’une autre personne ?
FH : Pour ce roman, il va de soit que je me suis inspirée de mon expérience personnelle - un auteur puise toujours dans sa propre vie - mais aussi de celle de certaines de mes amies, qui n’ont pas forcément un comportement bizarre, mais une personnalité différente. Cependant, il est vrai que le sujet abordé reste tabou, on ne l’évoque presque jamais. Il me semblait intéressant de l’aborder de ce point de vue là.
LTC : Il y a un fond religieux, une sorte de morale relative à la virginité dans votre livre ?
FH : Pas nécessairement, c’est un roman qui s’adresse à tout le monde, les hommes comme les femmes. L’intérêt est que les gens puissent s’y reconnaître, mais pas directement, qu’ils s’identifient, chacune et chacun, à leur manière au personnage, qu’il soit féminin ou masculin.
LTC : On a remarqué récemment qu’il avait un retour du mariage, de l’engagement, de la fidélité, etc. Est-ce que cela a un rapport avec votre livre ?
FH : Oui, tout à fait, parce que la question de l’engagement est de nature importante dans mon livre. Par contre, il est vrai que de nos jours on remarque que les gens s’engagent de moins en moins. Ce n’est pas un jugement de valeur, cela correspond vraiment à une tendance actuelle. Et cette jeune femme, là, représente cette part de non-engagement, que chacun d’entre nous peut vivre au quotidien. Donc, cela la rend d’autant plus atypique et en même temps très banale. Il est vrai qu’on peut tous croiser une personne comme cela autour de nous. Ce personnage ne « s’engage » pas dans la vie. Elle reste, seule, sur le seuil. Mais, va bientôt réagir…
LTC : Vous choisissez une héroïne en situation d’échec personnel, vierge de surcroit, prête à tout pour trouver l’âme sœur. Ce personnage semble en totale contradiction avec « LA » jeune femme d’aujourd’hui. Pourquoi ce choix ?
FH : Il me semblait intéressant avec ce livre de couper court aux préjugés véhiculés par la presse féminine et en général. Mon personnage existe vraiment. Et j’ai trouvé intéressant de contrecarrer cette stéréotypie de la sexualité. Tous ces éléments, là, sont en filigrane dans mon livre et c’est pourquoi sa lecture est faite pour que chacun puisse s’y retrouver.
LTC : Au travers de la lecture de votre livre est-ce que l’on peut en déduire que les hommes sont plus volages que les femmes ?
FH : Oui, c’est vrai, ils le sont, mais pas d’une manière générale. Sociologiquement, les femmes s’engagent plus, avant d’avoir un rapport sexuel. Alors, que certains hommes, eux, « n’ont pas besoin de cet engagement là ». Cela interroge la question des rapports homme/femme. En tant que femme, je cerne mieux la psychologie féminine.
LTC : Suite à l’influence de la famille et des ami(e)s, aux réflexions douteuses et aux sous-entendus perfides, cette jeune femme va devoir changer radicalement son destin. Que va-t-elle faire pour s’en sortir ?
FH : Il était important de dénoncer le matraquage exercé par notre société envers une personne restée en marge. Ce rapport négatif est d’autant plus douloureux que cette personne avance en âge. Je ne veux pas raconter la fin de mon histoire, mais sachez que l’héroïne va essayer de prendre les choses en main.
Florence Lhote, tous nos remerciements pour cet interview.
© Sylvain Rohe et Jean Dorval, le 05 mai 2009, pour LTC Lectures.
18:53 Publié dans LTC LECTURE | Lien permanent | Tags : l'été du livre à metz, place d'armes de metz, interview de jean-françois thull, jean de pange un lorrain en quête d'europe, éditions serpenoise, sébastien wagner, dictionnaire historique des rues de metz, florence lhote, vierge à 30 ans, sylvain rohe et jean dorval pour ltc lectures | Facebook |