concerto en piano : LTC - LA TOUR CAMOUFLE : QUELQUES NOTES DE VERS...

06/01/2020

Moussafir : Les voyageurs de la Fraternité Universelle.

Stéphane au oud, Michel à la flûte et Pablo à la guitare sèche.

Les Moussafir distillent savamment leur musique poétique orientale, un hymne permanent dédié à la Fraternité Universelle. Le genre de voyage hors du temps qui fait faire le tour du monde le temps d’un concert et fait ressentir l'âme des Orients du Monde par la puissance de ses instruments et la magie de ses voix.

Michel Groppe, dit "La Loi", au Kanoun.

Michel au saz.

. Les chantres du métissage donnent la note. – L’ensemble messin de musique traditionnelle orientale, Moussafir, existe depuis 1994. « Moussafir » veut dire « Voyageur » en arabe. Cela signifie aussi « invité ». Ce groupe de voyage musical invite son public au partage. Il joue pour lui et avec lui à domicile ou sur de petites scènes à visage humain. Ce groupe à géographie variable conjugue des personnes de confessions juive, musulmane et chrétienne, et des athées. Ces artistes passionnés de cultures et de musiques brassent leurs notes exceptionnelles. L’ensemble Moussafir fait partie de l’association 3M (Musiques Modales du Monde), basée à Metz. Ses membres affûtent leur talent depuis des années, devenant des virtuoses. Ils rencontrent les maîtres de leurs musiques, trouvent de nouveaux instruments faits de bois, de peau et de cordes, à vent ou à percussion, qui leurs correspondent. Cette renaissance permanente qui les anime entraîne le spectateur dans un tour du Monde permanent, durant lequel le soleil ne se couche jamais ; un répertoire musical très riche en partance pour le Maghreb, la Palestine, l’Asie, les Balkans, le Moyen-Orient, le Caucase, la Perse, en passant par les musiques latino, tzigane, arabo-andalouse, judéo-espagnole et séfarade, les chants syriens, etc. Ils ont produit plusieurs albums individuellement : Trio Berdah Faber Groppe (1994), Moussafir (2007), Michel Groppe (2010) et Erlanger Et Rahal (2011).

Pablo, "El Magnifico", à la guitare sèche.

. Une formation à géométrie variable. – Moussafir comprend de deux à huit membres en fonction des récitals. La configuration de base se compose de Stéphane Berdah et Michel Groppe. Stéphane Berdah joue du oud - un luth à manche court, un instrument de musique à cordes pincées très répandu dans les pays arabes, en Turquie, en Grèce, en Azerbaïdjan et en Arménie - et du bouzouki, un instrument de musique joué en Grèce ; de la famille des luths à long manche. Michel Groppe, quant à lui, s’adonne au Kanoun, une cithare sur table. Le mot « kanoun » est un nom arabe emprunté au grec « κανων » (qui se prononce « kanôn »), signifiant « la loi ». Six autres membres rejoignent le groupe dans sa configuration optimale. Christian Lebrun se met alors au violon et au kamanché, une vièle originaire d'Iran ; Omar Azzedine Bouhouhou au luth et aux percussions (comme le bendir), Mohamed aux percussions (djembé) et au chant, Laurence au chant et à la clarinette, Halima Mebarki au chant, et Pablo Steinberg à la guitare sèche, ainsi qu'à de nombreux instruments traditionnels argentins (paceño, pinquillo, etc.).

. Portraits d’autodidactes de talents. - Michel Groppe, musicien né, a débuté par la musique sud-américaine, avant de se tourner vers la musique orientale. Il a appris la musique arabo-turque, puis Hindoustanie, avant de chercher son propre dialogue avec les instruments de musique qu’il collectionne, tous... orientaux. Archetier de métier, 23b rue des Capucins, à Metz, il vend dans le monde entier ses archets en mèche de crin de cheval de Mongolie. Les répétions des Moussafir se déroulent tous les lundis dans son magasin. Michel est le puriste du groupe. En jouant, il pratique le Taksim, une improvisation, qui selon lui est « l’essence de la musique orientale ». Au fil de ses découvertes, il emmène ses amis explorer musicalement des contrées de plus en plus lointaines. « Stéphane est un frère » pour Michel. L’oud de cet ex-restaurateur de renom messin, charme son public avec ses intonations particulières. « Apprises de manière orale, comme le veut la tradition » insiste Stéphane. « Lors de ma jeunesse en Tunisie, je jouais des standards français. Puis, je suis revenu à mes racines, bercées de musiques traditionnelles, comme me l’avait annoncé ma grand-mère : Tu es comme une chèvre broutant autour d’un piquet. Plus tu t’en éloignes plus la corde s’enroule. Tu finiras par revenir à ton point de départ. » Pour ce faire, dans les années 90, il achète son premier oud en France et suit pendant plusieurs années les cours du maître Marc Loopuyt, à l’école de musique orientale de Woippy, avec deux autres membres du groupe : Halima et Christian. Puis, lors d’un mémorable voyage à Bagdad en 1994 à l’occasion d’un festival, il rencontre plusieurs maîtres et des musiciens de toutes les origines. Pour lui, c’est la révélation : « J’ai compris alors que l’on a des répertoires communs. En clair, on se connaissait, sans le savoir ! » Le violon et le Kamanché de Christian, quant à eux, s’harmonisent idéalement avec l’oud de Stéphane et prolongent magnifiquement les morceaux joués par le groupe.

Stéphane, la mémoire des musiques orientales, au oud.

. Musique savante en partage. – Stéphane explique : « La musique orientale est particulièrement subtile. Les notes varient beaucoup. » Il précise : « Comme elle est très codifiée, on parle de musique savante. Elle se transmet oralement grâce aux enseignements des maîtres. Celui qui l’apprend se doit de transmettre à son tour cette richesse. Au final, cette musique venue d’horizons divers, qui se joue partout dans le monde sur le même mode, est le fruit d’un savant métissage. » Michel complète : « Une de nos caractéristiques consiste à jouer des musiques avec des instruments qui ne leur sont pas destinés initialement. » Michel et Stéphane, toujours en quête d’expériences transcendantales, jouent régulièrement aux côtés d’autres passionnés de musiques et de chants méditerranéens et orientaux, comme l’Atelier d'Erlanger, association trans'cultures, de Vandœuvre-lès-Nancy, dirigé par Faousi Bentara. Une preuve supplémentaire pour ces deux Moussafir que l’expression latine « Mare nostrum » - qui littéralement signifie « Notre mer », en référence à la mer Méditerranée - est un véritable trait d’union entre toutes les cultures du bassin méditerranéen et d’ailleurs.

Pablo à la guitare sèche et Michel au djembé.

Stéphane au oud et Pablo au bendir.

Pablo au bendir.

. Le voyage Moussafir. – « Les diasporas juives et tsiganes ont enrichi et métissé le répertoire des musiques orientales au cours de leurs exils. Elles ont traversé les frontières avec leur musique nomade dans des circonstances pas toujours heureuses, amenant leur culture dans les pays de passage ou d’accueil. L’Empire Ottoman en a fait de même après avoir conquis les Balkans. La musique nomade, d’une très grande richesse, s’est adaptée au fil des siècles et a influencé les répertoires locaux. De l’action négative des envahisseurs, les artistes ont su tirer une vision artistique, syncrétique », constate Stéphane. « Par nos compositions faites de subtiles mélanges, par notre existence même, les Moussafir affirment que rien ne vaut le métissage. On démontre ainsi que l’art crée l’unité ». Les membres de ce groupe d’exception rassemblent patiemment les morceaux du grand puzzle des musiques orientales. Et Stéphane de conclure : « Tant que l’on n’a pas assisté à un concert de musique classique orientale, on n’imagine pas à quel point cette musique modale peut emballer les cœurs, plonger les esprits ouverts dans un bain de poésie, de sérénité et de bonheur. Ces airs, parfois chantés, sont construits de manière envoûtante. Ils sont à l’image des paysages et des ambiances de leurs origines, amenant à la fraternité universelle, à l’amour du prochain. »

Renseignements : http://www.myspace.com/moussafir.metz

Source documentaire et crédit photos : © Le Républicain Lorrain 2015/DR, avec l'aimable autorisation du journal.